Weather Maker Training Center

Vansechlaz ! Zéro ! S’exclame le prof.

Comment arrivez-vous à massacrer autant un modèle ? Je ne vous demande pas la lune !

Simplement une planète habitable ! Le prof déambule au milieu des rangées en inspectant les modèles climatiques. Il va, de ci, de là, contrôle un écran puis un autre.

Marie ! Souffle-t’il d’un ton déçu. Croyez-vous vraiment que d’essayer de noyer votre monde soit le meilleur moyen ? Seules les formes de vie aquatiques s’y développent. Regardez ! Mais regardez donc ! L’élève, pique du nez sur la dalle translucide devant elle, dépitée.

Deux ! Crie le prof, des protozoaires trouveront peut être ce lieu vivable !

Lin, qu’est ce que c’est que ça ! L’homme désigne une région balayée par une tempête tropicale. Ce n’est pas parce que vous venez de Chine que toute planète doit ressembler à une rizière. Cinq ! Et c’est bien parce qu’à défaut de périr noyés vos habitants arriveront peut être à l’âge du fer.

L’homme se calme un peu, se rapproche de l’estrade et commence à haranguer la vingtaine d’étudiants devant lui.

Bon, si vous êtes venus au Weather Maker Training Center, ce n’est pas pour reproduire les climats que vous connaissez chez vous. Vous avez tous réussi brillamment les épreuves de modélisation climatique ainsi que celle de terraforming le semestre dernier raison pour laquelle vous vous trouvez désormais dans cette classe.

Néanmoins je vous rappel que vous êtes candidats aux postes de régulateurs climatique au niveau Int-er-na-tio-nal ! Pousse-t’il en hachant chaque syllabe. Les petites arrangements de quotas en dérivant les excès sur les voisins ne fonctionnent pas pour une planète entière.

Je rappel l’objectif, reprend-il dans un souffle. Dans ces travaux pratiques, vous devez créer un monde au climat de type 2 habitable par une population humaine en tenant compte du chaos naturel du temps.

Arrêtez s’il vous plait de croire que ce qui marche au niveau local fonctionne pour la planète.

Je veux voir respecter les quotas d’ouragans ! Là, il désigne un élève du fond. Pour ceux qui pensent que le modèle d’Anis qui reproduit le climat de Luanda est fonctionnel, je rappelle qu’elle n’arrive pas à 5% du taux minimal de perturbations requis. Faire du beau temps pour stabiliser vos populations c’est bien, à condition de caser le mauvais quelque part.

Qu’est ce que vous croyez ? S’il n’y avait que du soleil avec des ondées pendant la nuit, vous ne seriez pas là !

Allez ! Reprend-il, à vos copies ! Remettez moi cela et un peu d’originalité s’il vous plait.

Reprenant sa ronde, il passe entre les tables en inspectant les travaux. D’un coup, il s’arrête.

Vansechlaz, souffle-t’il dans un murmure annonçant un grondement terrible. Qu’est ce que c’est que ce bricolage ?

Pour le coup, l’élève ne se démonte pas, c’est mon monde m’ sieur, et je le trouve bon.

  • Et qu’est ce qui te permet d’envisager de supposer de croire que cette croûte est préférable à ton autre lamentable tentative d’ersatz de climat susurre-t’il ?
  • Et bien là, j’ai tout bon, le climat est régulier et graduel sur l’ensemble, le quota de chaos est là, mais bien maîtrisé.

Le prof inspecte puis s’exclame ravi: mais c’est lamentable! Tu n’as pas les niveaux de pluies, ni de froid, ni de tempête. Et où sont donc les rafales glacées du cahier des charges ? Tu vas me saupoudrer cela et vite ! S’exclame l’homme ravi du désastre à venir.

  • l’élève ne se démonte pas.
  • Si, j’ai réussi à tout mettre en un seul endroit ! là, regardez, tout au Nord, j’ai stabilisé tout les fléaux que vous avez mis dans la catégorie « catastrophes imposées à but d’équilibre ».

Tss, j’ai dit « habitable ». Cette zone est invivable.

  • Si m’ sieur, regardez, y’a des hommes !

Le prof d’un sourire méprisant jette un œil, puis un second. Puis finalement grommelle :

  • Mais qu’est ce qu’ils foutent là ?
  • L’élève annonce fièrement. J’y ai mis du pétrole.

En bas, sur le modèle, à Kharyaga, deux hommes traversent une série de rafales de pluie glacées pour rejoindre la route de boue qui mène au site de forage.

SNCF, test d’embauche

TESTS SNCF
La SNCF embauche.

Le premier candidat s’assied et on lui demande de   compter jusqu’à 10.
– Oui, bien sûr. 10.9.8.7.6.5.4.3.2.1.
-C’est bien, et dans l’autre sens, maintenant ?
-Non, j’ai travaillé à la NASA et j’ai toujours compté ainsi.
-Désolé, mais vous ne convenez pas ! Candidat suivant !
Le deuxième candidat :
-Oui, bien sûr. 1.3.5.7.9.10.8.6.4.2.
-C’est bien, et dans le bon ordre, maintenant ?
-Non, j’ai travaillé comme postier et j’ai toujours compté ainsi en   passant de boîte en boîte…
– Désolé, mais vous ne convenez pas ! Candidat suivant !
Le troisième candidat :
-Oui, bien sûr. 1.2.3.4.5.6.7.8.9.10. – C’est parfait ! Où avez-vous   Travaillé auparavant ?
-J’étais chez EDF
-Chez EDF ? Je n’en reviens pas ! Mais, dites-moi, bien que ce ne   soit pas nécessaire, pouvez-vous continuer à compter après 10 ???
-Mais évidemment ! Valet, Dame et Roi !

Russie, printemps

Depuis trois jours, il pleut. La semaine dernière, il avait neigé quelques flocons de neige, recouvrant la lande d’un doux matelas de silence blanc et cotonneux.

Puis, la température est remontée un peu, et la pluie s’est invitée.

Non pas l’orage, qui jette violemment sa hargne contre les bâtiments de fer avant de se retirer, calmé, en laissant un coin de ciel bleu. Non, la pluie d’automne.

La grosse pluie lourde, sombre, qui frappe inlassablement tous hommes et toutes choses.

Progressivement, même les tôles de voitures semblent devenir poreuses. Le sol, pourtant composé de dalles de bétons s’est progressivement recouvert de boue. Tout est détrempé, tous est sales, devenu une soupe infâme dans laquelle nous jouons le rôle des croûtons.

Les ornières progressivement formées, les containers faisant office de bureau, les caillebotis de tôles, et nous, incarnons une bien belle caricature de chercheur d’or brésilien à la saison des puits.

En cette seconde ou une quinte de toux me stop dans mon élan, la comparaison prend tout son sens.

La réunion en une lettre

C’est une grosse émeraude mal dégrossit qui fleurit au milieu de l’océan Indien.

Frustre, plein d’inclusions, elle a ce charme inimitable que lui reconnaît le minéralogiste mais que lui refuse le tailleur de gemme.

Monocristal vif, ces facettes sont formées dans les différentes coulées des volcans. À travers les siècles et les millénaires, chaque lave, chaque basalte a caractérisé l’ensemble d’une petite touche unique mais néanmoins volcanique.

La structure est là, de la roche noire, sous fond vert. Le manteau de chlorophylle se veut changeant… et il l’est. En fonction des roches et des versants, de l’altitude, de la cote ouest battu par le vent ou de la cote est noyé sous la pluie, tout les arbres du monde se sont creusés une place au soleil de la petite ile ; ce soleil qui de la pointe du jour au crépuscule joue au chat et à la souris avec les brumes.

Le caractère de l’île en est simple, brute, frustre, changeant. Les images d’Épinal n’ont pas court plus de quelques minutes le temps d’en traverser une avant de passer à une autre.

Rêver y est simple. Il suffit de se laisser porter par le voyage, s’imprégner à chaque instant au bon moment, d’une des âmes vivantes ici.

Un vieux rêve


Un-vieux-reve


Il est des choses qui ne s’expliquent pas.

À la question, pourquoi faites vous ceci ou cela, parfois la réponse s’entête en un timide : je ne sais pas. Parfois ce n’est pas par intérêt, ce n’est pas par logique, c’est juste par envie.

Envie de quoi ? Envie c’est tout. Et l’envie prend sa source en soi même. Certaines envies sont latentes, attende l’instant ou, arrivées à maturité elles exploseront en se servant dans l’arbre des actions.

Certaines envies sont brèves et fugaces, surgissent de nulle part et disparaissent aussi vite.

Certaines envies durent longtemps, s’inscrivent dans le temps, sont omniprésentes et requiers beaucoup d’énergie pour être menée à bien… comme pour être ignorée.

Et certains n’ont pas d’envie… dommage, c’est con la vie!

Donc, mon envie à moi, là tout de suite, c’est d’aller me promener dans les coteaux de Jurançon en prenant l’air. Donc acte, voici mon nouveau coursier. Zolie non ?

Russie, 20 janvier 2009

Kharyaga - pampa 001

Le Blizzard s’était arrété. Une toute petite brise soufflotait encore quelques flocons de neige, mais le calme était là. au petit matin, un évènement merveilleux sétait produit. Tout d’abord timide, il s’éloigna du bord du monde tout doucement, petit à petit comme un oiseau malade. Puis, prenant du courage dans le calme matinal, il se flatta de la lumière d’une bougie. Une lueur apparu dans le lointain.

La lueur, d’abord blafarde, se cristallisa dans l’air glacé du matin. Puis, soudainement, le ciel s’embrasa comme il ne l’avait encore jamais fait. le Soleil s’était levé. Après bientôt trois semaines de tempête, il était revenu au vent tombé pour nous offrir un peu de sa chaleur, glacial certe, mais si délicieuse au visage.

Profitant de ce moment de grace, je faisait un tour armé de mon appareil photo dont, entre autre chose, surgit le cliché ci joint.

Russie, 12 janvier 2009

Le blizzard souffle depuis 3 semaines.

3 semaines d’un vent omniprésent noyant dans une éternelle brume de poussière de glace toutes formes et toutes choses.

Au milieu des tourbillons de poudre blanche, des formes fantomatiques évoluent, éternels spectres au cœur de cette toundra isolé de toute forme de cité. La bise siffle au travers de chaque interstice, rien ne résiste à la progression de la neige. Inlassablement, les bulldozers nettoient pour laisser un brin de surface plane aux quelques véhicules qui doivent absolument circuler.

L’architecture des voies et des bâtiments prend tous son sens. Les routes, toutes construites de longues sections de plusieurs kilomètres sur un remblai de deux mètres semblaient complètement ubuesques. Mais avec la bise de l’hiver, cette construction est pleine de sagesse. Les arbres coupés sur les bords laisse au vent la joie de battre la route de toute sa fougue, de toute sa force la maintenant propre de tout congère. Ceux-ci se forment un peu plus loin, au-delà du remblais qui, suffisamment haut, ne pourra jamais être débordé. Seul hic, le moindre poteau sur le bas coté est propice à la formation de montagnes de neige qui peuvent atteindre près d’un mètre en quelques heures.

A leur instar, les bâtiments construits sur pilotis se protègent eux aussi d’un enneigement prématuré grâce à leur deux mètres de hauteur. Tout ce qui avait été stocké au sol est désormais définitivement inaccessible.

Au milieu de cette tempête irréelle, des hommes. Transit, ils s’activent dans leurs armures de plumes pour ne pas céder au froid. Bouger, dégeler les poutres d’acier, mettre en place les vérins, chauffer l’huile pour l’empêcher de figer, mettre sous pression, prendre garde que l’acier cassant ne cède pas, installer la grue, la mettre sous le vent, se réchauffer.

Car dans la tourmente incessante le froid est de la partie. -20, -30, parfois moins. Il faut faire attention à tout, tout gèle, même les pierres.

En dépit du froid et du vent, en dépit de la rudesse de travail et du temps, la mélancolie s’attarde ailleurs. Le coup de grâce, est la nuit quasi perpétuelle. Lorsque lors d’une des rares accalmit le soleil pointe son nez, lorsque très loin au sud, un œil rougeoyant tangente quelques instants l’horizon, tous, nous prenons quelques instants pour regarder ce vieux camarade qui n’est ici que l’ombre de lui-même, qu’un souvenir.

Néanmoins, la vie y est belle, car sous la neige et la tempête, derrière les paravents et les cagoules, il y a des hommes. Des hommes plus que vivants, des hommes qui rient quand le vent souffle, car tant qu’ils l’entendent souffler, c’est qu’ils sont debout.

Ici, être juste vivant, c’est déjà quelque chose, et rien que cela, rend l’existence merveilleuse. Dans ce désert blanc, chaque chose, chaque être prend son sens

La plume

C’est un bien curieux objet que cet assemblage d’acier qui tout en couchant sur le papier que dicte la pensé, elle ajoute en toute chose sa propre idée.

C’est la poésie de la plume.

Elle habite dans les lettres, les rondeurs, les douceurs de son doux ou cahotant tracé. Elle est parfois douce, parfois cruelle, parfois sèche, souvent amère et maniée par un gaucher, cumule force traces et pâtés.

Pourtant, une fois apprivoisée, elle sait exprimer sa magie et chante la berceuse qui transpire dans toute main mais qui sans son éclat ne resterait qu’un leurre.

Russie, l’hiver

Kharyaga - pampa 006


Lors de mon dernier voyage ici, l’hiver était arrivé. Arrivé comme ça, non pas comme quelque chose qui surgit, non pas comme quelque chose qui s’invite, mais comme quelqu’un qui est là, présent.

Nul besoin d’imposer sa présence, nul besoin de demander la permission ou même de la prendre, l’hiver existe tel le patriarche et on lui cède la place.

L’hiver possède ici ses quartiers. Dans le reste du monde la lutte entre les saisons est une course effrénée, un galop certain, une lutte pour la domination sans cesse remise en cause par le déroulement du temps. Tic, tac, chaque second compte.

Ici, non. Le Maître est là, serein. Il prend son temps, tranquille. Parfois il s’amuse…

Si au début de novembre il récupère encore de ses voyages ardues dans le sud du monde, à l’approche du début de décembre, il reprend du poile de la bête.

Un jour, vers midi, l’air n’a pas la même odeur. Plus cristallin. Ceux qui connaissent le pays se sont levés plus tôt pour mettre en chauffe les voitures. Pourtant, il ne fait pas si froid. -15°C comme tous les jours depuis quelques semaines.

Mais là, le vent souffle. Dés le début de l’après midi, dans la lumière crépusculaire fidèle serviteur du maître des lieux, le ciel s’éclaircit. Le soleil apparaît sous l’horizon lointain. Il procure sans doute un peu de douceur en d’autres lieux, pour d’autres hommes.

Ici, la lumière n’apporte nulle chaleur. Juste un petit peu de bonheur de voir ce fidèle compagnon.


Russie - Kharyaga - pad108 031


Pourtant, cet ami lumineux de toujours annonce par sa présence le début du jeu. La température décroît. -10… à midi. -14 à 14h. -15 à 15h. -18 à la débauche. -20 au repas. Moins deux degrés par heure. La nuit, il fait froid. Moins 20°C. Le lendemain, moins 25.

L’acier se pique d’une fine couverture de cristaux de glace que rien ne peut décrocher. Chaque particule de fer s’est recouverte de cette mousse argentée qui miroite dans la lumière blafarde.

L’air est glacial. -25°C. Les poiles du nez commence à geler. Protéger derrière nos écharpes, l’Oeuvre continue. Inlassablement, les petits bonhommes de laine continue leurs taches. Tout ce qui a été négligé est désormais gelé. Les lignes d’air comprimé mal confinées : gelées. Les conduites de pression, gelées. Les canalisations d’eau… non, elles tiennent. Les résistances électriques déversent des milliers de watts de chaleur pour maintenir les circuits d’eaux chaudes… pour maintenir le chauffage.

Mais l’hiver s’amuse. -26…-27…-30… là une légère brise se lève. Pas grand-chose, à peine de quoi dévier de son voyage vers les cieux la flamme de la torchère. Pourtant, se petit courant d’air si souverain lors des grandes chaleurs d’été s’avère un redoutable traître. -36°C. Les yeux me font mal.

J’ai froid aux yeux, terriblement froid. Mes pauvres mirettes se confinent derrière une millimétrique fente d’air qui sépare la base de la chapka de mon écharpe. Même ainsi. J’ai froid, si froid. Ce damné vent entraîne ma pauvre petite protection d’air tiède de seulement -15°C pour le remplacer par ce si vicieux -35°C. C’est si bête. Les mains, les pieds même, je n’ai pas froid. Seulement ces dards de glace qui s’attaque à mon pauvre iris le transpercent d’imaginaires mais pourtant bien cruels tessons de douleurs.


Russie - Kharyaga - pad108 002


Providentiellement, le jeu cesse. La température remonte jusqu’à un souverain et délicieux -20°C qui nous redonne goût aux travaux extérieurs. Dans ces conditions quasi estival, nous pouvons déposer les armes et goûtons à nouveau le plaisir de pouvoir passer dehors, brièvement, en chemise.

Le lieu n’en est pas moins baigné de lumières étranges, divines. En effet, l’air imprégné de glace diffracte toute lueur d’une bien curieuse manière. Les torchères n’irradient pas uniformément autour de la flamme comme toute lumière bien élevée devrait le faire mais génère un pilier d’air embrasé s’élevant vers le ciel.

Impossible de se lasser de ce spectacle ou le feu issu de l’industrie des hommes échappe aux règles de la physique pour prendre sa liberté dans un voyage vers le ciel qui ne peux que faire rêver les témoins que nous sommes.