Angola – un simple quidam

Luanda.

L’air est saturé de lumière et de poussière, je plisse les yeux. Je suis un quidam mais pas un passant. Je ne suis personne, une fourmi parmi tant d’autres et comme mes semblables, je suis présent sans vraiment appartenir à la cité. Cette ville fonctionne à plusieurs vitesses. Parmi tous les flux et reflux,  le nôtre semble tout faire à contre courant.

Je suis géologue expatrié pour une compagnie pétrolière.

La voiture qui m’emmène est verrouillée dès l’instant où je monte à bord. Je suis à l’arrière, les portes sont closes, quand bien même je le souhaiterais elles ne s’ouvrent pas. Mon regard erre par la fenêtre sans plus rien voir. Mes yeux ouverts sont aveugles. Nous traversons l’immense bidonville qui borde l’aéroport, c’est le Mousek. Avant, il ne s’écartait que d’un kilomètre autour du centre ville. Aujourd’hui, ces baraquements de béton et de tôles serrés les uns contre les autres s’étirent à perte de vue. La voiture roule lentement. Le chauffeur comme tous les autres, virevolte sur la route défoncée. Entre les voitures, une multitude de jeunes vendent tout et n’importe quoi. Ceintures, briquets, homards, pèse-personne, devise locale, clefs à molette, téléphones portables. Le flot est lent. De temps en temps, un véhicule ralentit. Le vendeur court alors à son côté pour marchander. La voiture ne s’arrêtera que si le bouchon continu l’exige. Il faut avoir de bonnes jambes.

Au bord de la route, des bidons, des canettes, des pneus, une épave calcinée, un homme endormi s’ajoutent au relief des bâtiments soviétiques décatis. Mon regard s’attarde sur une fenêtre. Au milieu des antennes satellites et des climatiseurs, des impacts réguliers  marquent d’antiques rafales de mitrailleuses.

Après un temps court, ou long, vingt minutes ou deux heures, la voiture s’engage sur la Marginale, une large avenue qui court le long de la baie. Côté mer, des myriades de bateaux, de tankers, de cargos parsèment l’onde. En face, dans la flèche de sable qui sépare Luanda de l’océan, des épaves échouées sont rattrapées par les dunes. La récupération de leur acier aura bientôt raison de leur coque et seules les mégastructures indécoupables fossilisent au milieu des habitats qui suivent l’avancé du sable. Elles serviront de squelette à l’enchevêtrement de cabanes qui colonise chaque espace libre. Coté ville, derrière une caricature de Gattaca, derrière les tours des grandes compagnies pétrolières, derrière le palais présidentiel au sommet de la colline, il y a toujours le Mousek. Les étages appartiennent aux nantis mais le sol reste sa propriété. Il est partout, entre chaque bâtiment, entre chaque tour, entre chaque dalle. Ses habitants cherchent la vie, la subsistance partout où cela est possible. Le moindre kwanza gagnable sera gagné, parfois arme au poing.

Je suis un quidam, un insignifiant, mais l’expatrié que je suis est bien visible bien au milieu de cette fourmilière. Le Mousek n’est pas raciste, mais il a faim, et nous, étrangers naïfs, nous sommes si peu dangereux, si faciles à dépouiller.

Luanda est une mégapole prévue pour sept cent mille habitants en abritant sept millions. Le pétrole, manne inépuisable, a découragé toute autre activité.

Les compagnies pétrolières, semblables à d’immenses séquoias géants au milieu d’une steppe vide, s’élèvent dans la vie du pays comme les tours de bureaux qu’elles occupent. Elles sont omniprésentes, riches, colossales, pleines de sève. Autour d’elles gravite un miasme ininterrompu d’opportunistes. Tel du gui, tous ceux qui ont un peu de force, de pouvoir de créativité parasitent les rares fleurons de ce pays.  En bas de cette échelle de pouvoir, ceux qui n’ont aucun moyen de prendre une part de ces richesses restent dans la misère, ils peuplent le Mousek.

Une forêt sans âme pousse sur Luanda. Les arbres pétroliers croissent sur une terre désespérément aride où rien d’autre ne trouve de place. Ils doivent grandir vite car depuis leurs bases jusque déjà haut dans les branches, le gui recouvre tout.

Je suis un expat. Je suis là pour faire vivre, pour donner une dynamique à la croissance de cette entreprise déjà immense dans l’écosystème local. Nous sommes des milliers. Ils sont des millions. Pour chaque nouvelle branche, il faut de plus en plus de ressources, de temps, de risques. C’est une course, le gui, la masse des profiteurs recouvre tout, paralyse tout, asphyxie tout.

Il est efficace et redoutable d’imagination. Le port par lequel le gouvernement impose à tous de transiter, qui lui appartient et dont les prix sont aussi changeants que le cours d’une rivière; le racket organisé par les flics pour récupérer leur part du gâteau; les braquages qui ont lieu juste après les flics, kalachnikov en main pour ratisser les miettes; les quotas de personnels employés pour forcer un illusoire transfert de compétences; les pots de vin sur les frais de dédouanement, tellement organisés qu’ils obéissent à un barème : dix pour cent de la valeur du bien pour un dédouanement “rapide” en seulement une semaine.

Toute la créativité de la ville est employée à ponctionner la richesse existante. Il ne reste rien pour en créer, et le Mousek croit.

Toucher à ce parasitisme, chercher à assainir quelque aspect de ce milieu délétère, remet en cause un équilibre fragile de lutte d’influences menées par des experts retords. Toute la structure sociale est affectée car indépendamment des hommes de pouvoirs, un équilibre perfide s’est installé.

Les enjeux sont énormes. La corruption et le parasitisme sont tellement ancrés dans la vie, qu’ils sont devenus des moteurs d’ascension sociale bien plus efficace que toute forme de travail.

Alors nous préparons. Nous entretenons l’arbre, soignons de nouvelles branches tentons de freiner le gui là où il n’est pas encore implanté. Fiers de notre œuvre, nous la contemplons avec regrets, car il faut l’oublier. Tôt ou tard, il n’en restera rien.

Il n’y a pas d’autres arbres que les compagnies pétrolières. L’Angola,  pays béni des dieux, un climat heureux, des pluies régulières, trois récoltes par an, est importateur de nourriture. Pourquoi produire quelque chose, pourquoi créer un arbre agronomique, industriel, financier? La sève de l’arbre pétrolier est tellement plus facile d’accès.

La voiture s’engage sous le porche. Dans les deux mètres qui me séparent de l’hôtel, cinq gardes veillent. Dans cet espace, l’odeur d’égout, d’urine et de fiente me prend à la gorge. Les quelques arbres sont envahis d’un millier de mouette, ils sont morts, tués par l’acidité des déjections. Une canalisation d’égout reste béante, quelques tôles ondulées cachent un chantier abandonné. Nous sommes à Chicala, une des zones chics de Luanda.

Depuis mon Club Med avec bar en faux torchis je contemple la mer. Les débris de caoutchouc et la bouche d’égout un peu plus loin me soufflent d’éviter la baignade. Au loin j’entends une boite de nuit. La jeunesse de Luanda peut s’y retrouver pour peu qu’elle puisse trouver les centaines de dollars nécessaires. Les expats y vont rarement. C’est trop cher.

Face à ma piscine, sur le transat un whisky à la main, je contemple nonchalamment la ville. Heureusement, dans un mois, je rentre en France.


Paris.

La lumière cristalline de ce début de mars m’accueille d’un lever de soleil sur le train qui me ramène de Roissy. Mon regard erre par la fenêtre vers les cités de la Courneuve et de Saint Denis. Je note l’absence de voiture brulée, les bennes à ordures vidés, les rues propres. Les barres d’immeubles des années soixante ne sont finalement pas si mal et on peut encore voir la couleur des murs sous les graffitis. Le train se remplit. Un jeune homme se lève spontanément pour laisser s’asseoir une vielle dame. Je rêvasse en pensant à toutes ces voitures qui n’existent pas grâce au métro. Gare de Lyon, un passant m’indique précisément mon chemin, le sourire aux lèvres. Je suis une fourmi, un insignifiant, personne. Une multitude d’arbres poussent: Ils n’ont pas l’allure d’un géant pétrolier, ils sont moins grands, leurs frondaisons moins luxuriantes et certains sont morts. Une forêt entière grandit sous le soleil. Sur les branches basses, juste un peu de gui à peine remarqué. Au loin, par-dessus les toits, d’autres toits, peut être moins beaux, mais des toits. Que j’aime Paris.

 7 mars 2014, Paris, gare de l’Est

La plume

C’est un bien curieux objet que cet assemblage d’acier qui tout en couchant sur le papier que dicte la pensé, elle ajoute en toute chose sa propre idée.

C’est la poésie de la plume.

Elle habite dans les lettres, les rondeurs, les douceurs de son doux ou cahotant tracé. Elle est parfois douce, parfois cruelle, parfois sèche, souvent amère et maniée par un gaucher, cumule force traces et pâtés.

Pourtant, une fois apprivoisée, elle sait exprimer sa magie et chante la berceuse qui transpire dans toute main mais qui sans son éclat ne resterait qu’un leurre.

Russie, l’hiver

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Lors de mon dernier voyage ici, l’hiver était arrivé. Arrivé comme ça, non pas comme quelque chose qui surgit, non pas comme quelque chose qui s’invite, mais comme quelqu’un qui est là, présent.

Nul besoin d’imposer sa présence, nul besoin de demander la permission ou même de la prendre, l’hiver existe tel le patriarche et on lui cède la place.

L’hiver possède ici ses quartiers. Dans le reste du monde la lutte entre les saisons est une course effrénée, un galop certain, une lutte pour la domination sans cesse remise en cause par le déroulement du temps. Tic, tac, chaque second compte.

Ici, non. Le Maître est là, serein. Il prend son temps, tranquille. Parfois il s’amuse…

Si au début de novembre il récupère encore de ses voyages ardues dans le sud du monde, à l’approche du début de décembre, il reprend du poile de la bête.

Un jour, vers midi, l’air n’a pas la même odeur. Plus cristallin. Ceux qui connaissent le pays se sont levés plus tôt pour mettre en chauffe les voitures. Pourtant, il ne fait pas si froid. -15°C comme tous les jours depuis quelques semaines.

Mais là, le vent souffle. Dés le début de l’après midi, dans la lumière crépusculaire fidèle serviteur du maître des lieux, le ciel s’éclaircit. Le soleil apparaît sous l’horizon lointain. Il procure sans doute un peu de douceur en d’autres lieux, pour d’autres hommes.

Ici, la lumière n’apporte nulle chaleur. Juste un petit peu de bonheur de voir ce fidèle compagnon.


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Pourtant, cet ami lumineux de toujours annonce par sa présence le début du jeu. La température décroît. -10… à midi. -14 à 14h. -15 à 15h. -18 à la débauche. -20 au repas. Moins deux degrés par heure. La nuit, il fait froid. Moins 20°C. Le lendemain, moins 25.

L’acier se pique d’une fine couverture de cristaux de glace que rien ne peut décrocher. Chaque particule de fer s’est recouverte de cette mousse argentée qui miroite dans la lumière blafarde.

L’air est glacial. -25°C. Les poiles du nez commence à geler. Protéger derrière nos écharpes, l’Oeuvre continue. Inlassablement, les petits bonhommes de laine continue leurs taches. Tout ce qui a été négligé est désormais gelé. Les lignes d’air comprimé mal confinées : gelées. Les conduites de pression, gelées. Les canalisations d’eau… non, elles tiennent. Les résistances électriques déversent des milliers de watts de chaleur pour maintenir les circuits d’eaux chaudes… pour maintenir le chauffage.

Mais l’hiver s’amuse. -26…-27…-30… là une légère brise se lève. Pas grand-chose, à peine de quoi dévier de son voyage vers les cieux la flamme de la torchère. Pourtant, se petit courant d’air si souverain lors des grandes chaleurs d’été s’avère un redoutable traître. -36°C. Les yeux me font mal.

J’ai froid aux yeux, terriblement froid. Mes pauvres mirettes se confinent derrière une millimétrique fente d’air qui sépare la base de la chapka de mon écharpe. Même ainsi. J’ai froid, si froid. Ce damné vent entraîne ma pauvre petite protection d’air tiède de seulement -15°C pour le remplacer par ce si vicieux -35°C. C’est si bête. Les mains, les pieds même, je n’ai pas froid. Seulement ces dards de glace qui s’attaque à mon pauvre iris le transpercent d’imaginaires mais pourtant bien cruels tessons de douleurs.


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Providentiellement, le jeu cesse. La température remonte jusqu’à un souverain et délicieux -20°C qui nous redonne goût aux travaux extérieurs. Dans ces conditions quasi estival, nous pouvons déposer les armes et goûtons à nouveau le plaisir de pouvoir passer dehors, brièvement, en chemise.

Le lieu n’en est pas moins baigné de lumières étranges, divines. En effet, l’air imprégné de glace diffracte toute lueur d’une bien curieuse manière. Les torchères n’irradient pas uniformément autour de la flamme comme toute lumière bien élevée devrait le faire mais génère un pilier d’air embrasé s’élevant vers le ciel.

Impossible de se lasser de ce spectacle ou le feu issu de l’industrie des hommes échappe aux règles de la physique pour prendre sa liberté dans un voyage vers le ciel qui ne peux que faire rêver les témoins que nous sommes.

Russie, logging

Pourquoi, mais pourquoi donc?

 Pendant 3 jours, j’ai travaillé sur une opération comme il en arrive une fois tout les deux mois. 3 jours, 69 heures exactement d’une opération complexe, difficile nécessitant une attention de tous les instants.

3 jours, où j’ai dormi une heure par ci et une autre par là, sur une chaise ou sur le sol de mon bureau, récupérant une précieuse énergie à distiller le plus efficacement possible.

Et pendant ces trois jours, pas un seul instant je n’ai souhaité être ailleurs… mais pourquoi ?

Pourquoi alors que dans la routine des journées classiques un vague à l’âme m’envahis et je me prête à rêvasser à une existence « normal », pourquoi alors que souvent, je songe à des semaines ordinaires de 5 jours où je pourrais profiter des plaisirs de la ville à mon envi, pourquoi dans cette folie d’organisation et d’attention qu’est le suivi d’une opération de diagraphie je n’ai, pas un seul instant souhaité qu’elle n’ai pas lieu ?

Bien sur, j’ai eu hâte qu’elle finisse, mais j’étais bien.

Pourquoi…

Parce que.

Parce que lorsque dans cette activité, au bout du monde, dans le vent qui gèle à pierre fendre, sous les bourrasques de neiges et dans cette recherche, longue de chaque détail, je suis vivant.

Parce qu’en ces instants où je m’arrête une brève seconde pour regarder la pleine lune qui pose sur moi son regard blafard, le monde moderne n’existe plus.

Il n’y a plus que cette petite unité, cette boite farci d’ordinateurs et d’hommes de quatre mètres carrées où sont enregistrés des milliards d’octets d’informations. Les contraintes de chaque seconde sont simples, enregistrer, organiser le ravitaillement en essence, contrôler les données, prévoir les casse croûtes, cherche la cause d’une erreur, planifier les précieuses heures de sommeils,

Somnoler, se réveiller, reprendre, manger, boire, café… café… café.

Le monde n’existe plus, il n’y a plus que nous. Nous sommes libres, nous sommes vivant. En ces longues heures, les règles changent. Il y des hommes qui font leur job, mais il y a surtout des humains qui vibrent au diapason d’une vibration commune, en échos au grognement des tréfonds de l’humanité.

Là, en ces moments uniques, plus besoin de se demander si la vie à du sens, nous vivons.

Plus besoin de se demander qui nous somme, nous existons.

Plus besoin de chercher pourquoi nous existons, nous savons.

Dans ce dépouillement, dans cette tache à laquelle nous nous sommes aliénée, le voile que nous portons sur notre propre existence se lève à nos yeux. Nous nous découvrons à nous-mêmes.

Causerie

Vous êtes un beau ciel d’automne, clair et rose !
Mais la tristesse en moi monte comme la mer,
Et laisse, en refluant sur ma lèvre morose
Le souvenir cuisant de son limon amer.

– Ta main se glisse en vain sur mon sein qui se pâme ;
Ce qu’elle cherche, amie, est un lieu saccagé
Par la griffe et la dent féroce de la femme.
Ne cherchez plus mon coeur ; les bêtes l’ont mangé.

Mon coeur est un palais flétri par la cohue ;
On s’y soûle, on s’y tue, on s’y prend aux cheveux !
– Un parfum nage autour de votre gorge nue !…

Ô Beauté, dur fléau des âmes, tu le veux !
Avec tes yeux de feu, brillants comme des fêtes,
Calcine ces lambeaux qu’ont épargnés les bêtes !

Les fleurs du mal, Baudelaire

Le mot et la chose

Madame, quel est votre mot,
Et sur le mot et sur la chose ?
On vous a dit souvent le mot,
On vous a fait souvent la chose.

Ainsi, de la chose et du mot
Vous pouvez dire quelque chose.
Et je gagerais que le mot
Vous plaît beaucoup moins que la chose.

Pour moi, voici quel est mon mot,
Et sur le mot, et sur la chose :
J’avouerai que j’aime le mot,
J’avouerai que j’aime la chose.

Mais, c’est la chose avec le mot,
Mais, c’est le mot avec la chose,
Autrement, la chose et le mot
A mes yeux, seraient peu de chose.

Je crois même, en faveur du mot,
Pouvoir ajouter quelque chose ;
Une chose qui donne au mot
Tout l’avantage sur la chose :

C’est qu’on peut dire encore le mot,
Alors qu’on ne fait plus la chose.
Et pour peu que vaille le mot,
Mon Dieu, c’est toujours quelque chose !

De là, je conclus que le mot
Doit être mis avant la chose.
Qu’il ne faut ajouter au mot
Qu’autant que l’on peut quelque chose.

Et pour quelque jour où le mot
Viendra seul, hélas, sans la chose,
Il faut se réserver le mot
Pour se consoler de la chose.

Pour vous, je crois qu’avec le mot,
Vous voyez toujours autre chose.
Vous dites si gaiement le mot,
Vous méritez si bien la chose,

Que pour vous, la chose et le mot
Doivent être la même chose.
Et vous n’avez pas dit le mot
Qu’on est déjà prêt à la chose,

Mais quand je dis que le mot
Doit être mis avant la chose,
Vous devez me croire à ce mot,
Bien peu connaisseur en la chose.

Eh bien, voici mon dernier mot,
Et sur le mot et sur la chose :
Madame, passez-moi le mot
Et je vous passerai. la chose.

Abbé de l’Attaignant (1697 – 1779, Chanoine à Reims)

Une bougie dans la nuit

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C’était un soir, à moins que ça n’ait été un matin. La nuit était profonde.

Une lumière au loin perçait dans la brume. La lueur chevrotante, balayée par la bise, unique témoin de chaleurs dans le torrent de neige tombant du ciel, guidait mes pas.

Je conduisais doucement, encaissant les bourrasques de neiges, évitant les congères.

La lueur grandissait.

Je m’approchai alors d’une butte. Derrière, la teinte orangée de milles brasiers perçait la tempête et sourdait par-dessus la colline.

En passant de l’autre coté, un fanal insupportable me brûla les yeux. La bougie c’était transformée en phare, éclairant parfaitement la steppe alentour.

Ainsi guidé, je n’avais presque plus besoin de mes phares. La route était désormais parfaitement visible, je continuai sans peine.